Saint PIE X
Giuseppe Sarto, plus connu sous le nom de Pape
Pie X, naquit le 2 juin 1835 à Riese, une bourgade de 4500 habitants,
dont ses parents, Jean Baptiste Sarto et Marguerite Sanson, contractèrent
mariage le 13 février 1833 à l'église paroissiale st. Mathieu. C'est
justement là que fut baptisé le petit Joseph, le lendemain de sa venue
au monde.
Issu d'une famille modeste, Jean Baptiste exerçait
l'emploi d'huissier municipal; quant à Marguerite, elle était couturière
de campagne. De leur union naquirent dix enfants: Joseph, Guiseppe
(Joseph), Ange, Thérèse, Rose, Antonia, Marie, Lucie, Anne, et Pierre;
mais le premier et le dernier des garçons (Joseph et Pierre), à peine nés
s'envolèrent au Paradis. Voilà pourquoi le second enfant fut baptisé
Giuseppe (Joseph). Pourtant, qui pouvait dire de ce dernier, qu'un jour il
serait le successeur de saint Pierre!...
Comme
dans toutes les modestes familles nombreuses, la famille Sarto devait
faire attention, car les revenus étaient faibles, mais tous se résignaient
à la volonté du Seigneur, contents de la table qu'il leur servait chaque
jour.
Épouse et mère exemplaire, Marguerite s'efforçait d'inculquer à ses
enfants les vertus chrétiennes qu'elle avait elle même hérité de ses
parents.
C'est dans cet esprit que le petit Joseph
grandissait. Souvent, il allait prier au sanctuaire de Cendrole, à un
kilomètre de Riese, car déjà très jeune il avait une dévotion toute
spéciale pour la Sainte Vierge. Jamais il ne manquait le catéchisme ni
manquait à la Messe. C'était pour lui une joie d'assister aux offices et
servir à l'autel comme enfant de chœur. À la maison, il se plaisait à
construire avec ses frères de petits autels, où, avec une simplicité
enfantine, il s'exerçait aux cérémonies de l'église. Ces actes de piété
naïve déposaient en son cœur les premiers germes de cette vocation qui
un jour devait faire de lui le saint Pape que nous connaissons.
Ce goût prononcé pour le catéchisme et la
Messe ne manqua pas d'attirer l'attention de Don Fusarini, le curé qui
l'avait baptisé. Quand il eut terminé, avec succès, ses études élémentaires,
il apprit le latin et fréquenta comme externe, de 1846 à 1850, le collège
de Castelfranco (à 7 km de Riese) pour des études secondaires. Sur ces
entrefaites, Joseph Sarto reçut la Confirmation le 1er décembre
1845 dans la cathédrale d'Asolo, et la première Communion le 6 avril
1847.
Été comme hiver, il parcourait à pied deux
fois par jour la route qui le conduisait de chez lui au collège, avec un
morceau de pain dans la poche pour son repas. Excellent élève, il était
toujours le premier. Après un brillant succès aux examens, le jeune garçon
voulait entrer au Séminaire car il se sentait appelé par le sacerdoce.
Ses parents n'étaient pas en état de faire des frais pour payer les études
de leur fils. Les maigres revenus de ses parents suffisaient à peine à
faire vivre la nombreuse famille, et il était impossible de s'engager
dans des frais supplémentaires.
Les prières et la confiance en la Divine providence apporta consolation
à la famille: Le patriarche de Venise disposait de plusieurs bourses d'études
pour le séminaire de Padoue, en faveur des jeunes gens qui souhaitaient
aspirer au sacerdoce. Le cardinal Jacopo Monico, originaire de Riese, fut
informé par un curé du cas difficile de la famille Sarto, et très
volontiers on lui attribua l'une de ces bourses.
AU SÉMINAIRE DE PADOUE
Le jeune Joseph entra au séminaire à l'automne
de 1850 où il y resta pendant huit ans. Ses supérieurs avaient gardé de
lui un très bon souvenir. Il devint bien vite pour ses condisciples un
modèle d'humilité et de simplicité; vertus qu'il sut toujours allier à
une grande fermeté de caractère. Maîtres et élèves appréciaient son
intelligence, mais lui n'en tirait point vanité, ni ne cherchait point à
paraître.
A Riese, tout le monde connaissait la situation très modeste de la
famille Sarto. Bien que reçu gratuitement au Séminaire pour ce qui
regarde la pension, les parents devaient faire face aux frais
d'habillement, aux achats de livres et tout ce qu'il faut à un élève de
Grand Séminaire. Quelques familles, qui estimaient et aimaient le jeune
Sarto lui fournissaient un peu d'argent pour ces dépenses.
Le 4 mai 1852 un grand malheur vint troubler la
joie de Joseph Sarto: la mort de son père, qui du coup plongea la famille
dans une situation économique plus que dramatique. En cette douloureuse
circonstance, Don Fusarini, archiprêtre, fut vraiment son ange
consolateur: il assura à son père mourant qu'il continuerait à aider
son fils Joseph dans ses études et ne cesserait de soulager les misères
de la famille. Ainsi, le jeune séminariste se remit entre les mains de
Dieu et se résigna à Sa volonté divine en esprit de sacrifice.
Son attention était aussi tourné à la musique et au chant d'église, si
bien que ses supérieurs firent de lui le maître de chapelle du Séminaire.
À la fin de l'année scolaire 1857-58, Joseph Sarto termina ses
brillantes études.
PREMIÈRE MESSE
Le 18 septembre 1858 il fut ordonné prêtre.
L'ordination se fit à la cathédrale de Castelfranco, et le lendemain,
assisté par le curé de Riese, il put chanter avec une grande dévotion
se première Messe là même où il fut baptisé. Peu après il fut nommé
vicaire à Tombolo.
CURÉ À SALZANO
Au mois de mai 1867, alors âgé de 32 ans, il
fut nommé archiprêtre de Salzano où il restera pendant neuf ans. Ses
revenus étaient un peu plus important ici, mais ils servaient aux pauvres
et aux malades. Il pensait à tous, excepté à lui-même, heureux
seulement quand il pouvait faire du bien au prochain.
En neuf ans, il avait gagné les coeurs des paroissiens par sa parole, par
ses actes et l'exemple d'une vie sainte.
CHANOINE À TRÉVISE
Trévise est situé à trente kilomètres de
Venise. En 1875, trois stalles de chanoines se trouvèrent vacantes à la
cathédrale de Trévise. L'Évêque songea donc à l'archiprêtre Sarto,
dont il appréciait les éminentes qualités d'esprit et de coeur. En
apprenant que L'Évêque voulait le nommer chanoine, il demanda à être;
dispensé de cette charge, mais en vain. C'est donc le 21 juillet 1875
qu'il se rendit à la cathédrale de Trévise pour prendre possession de
son canonicat.
Quand il entra en fonction comme Directeur spirituel, le Séminaire
comptait deux cent trente élèves, dont soixante-dix clercs.
A Trévise aussi Mgr. Sarto distribuait en aumônes une bonne partie des
ses revenus. Il voulait que personne ne le sût, selon le mot de l'Évangile:
"Que votre main gauche ignore ce que fait votre main droite"
(Matthieu 6: 3); mais il avait beau agir dans le
secret, on sut bientôt qu'il venait en aide aux séminaristes pauvres,
qu'il payait aux uns la soutane, aux autres le chapeau, à beaucoup les
livres...
Autant il était charitable pour les autres, autant par contre il était sévère
pour lui-même: il se souciait peu de ses vêtements ou de ses chaussures.
Quel bel exemple de charité pour son prochain...!
VICAIRE CAPITULAIRE
Après la mort de Mgr. Zinelli, survenu le 24
novembre 1879, il eut la charge de gouverner le diocèse de Trévise du 27
novembre 1879 au 23 juin 1880. Ce peu de temps lui suffit pour faire
beaucoup: Il prêchait plus qu'à l'ordinaire, redressait les mauvaises
habitudes, introduisait les réformes que les constitutions Apostoliques
permettent aux vicaires capitulaires; mais son plus grand souci était que
le peuple fût instruit de la religion, les enfants catéchisés et préparés
avec soin à la première Communion.
LE SIÈGE ÉPISCOPAL
Les multiples mérites de cet homme de Dieu, ses
vertus remarquables, sa sainteté de vie, son zèle pour le salut des âmes,
sa compétence à gouverner le diocèse de Trévise étaient choses bien
connues du Pape Léon XIII, qui, voulant lui témoigner sa confiance, le
nomma dans le Consistoire du 10 novembre 1884, à l'évêché de Mantoue.
L'humble
Joseph Sarto, loin de s'en réjouir, regarda cette nomination comme un
malheur et écrivit même au Vatican pour la faire révoquer, se déclarant
indigne d'un tel honneur et incapable de porter ce fardeau; mais sa
demande fut rejetée. Il partit donc pour Rome, où, le dimanche 16
novembre 1884, jour dédié au patronage de Marie la Vierge Immaculée
protectrice de Mantoue, il fut sacré évêque dans l'Église de St.
Apollinaire.
Le 25 février 1885, Mgr. Sarto obtint l'exequatur à la Bulle
pontificale qui le nommait à l'évêché de Mantoue; et c'est le 18 avril
1885 qu'il fit son entrée solennelle dans cette ville sous les
applaudissements de la foule joyeuse et au son des cloches de la citée.
Pour les hommes destiné à de grandes choses,
les voies de la Providence sont souvent mystérieuses. Mgr. Sarto dut
faire face à beaucoup de difficultés; sa nouvelle fonction se présentant
toute hérissée d'épines: nombreuses étaient les réformes à faire;
mais avec une inaltérable confiance en Dieu, il se mit au travail.
Il s'occupa d'abord du clergé: afin de relancer les vocations, il demanda
que chacun selon son pouvoir vînt en aide aux séminaristes, de qui dépendait
tout espoir d'un avenir meilleur pour le diocèse. Le résultat fut
positif car le nombre des clercs s'éleva à 147.
Mgr. Sarto eut particulièrement à cœur de former les séminaristes à
l'esprit sacerdotal, au zèle pour le salut des âmes jusqu'au sacrifice
de soi-même. Pour chaque jeune homme qui souhaitait entrer au séminaire,
il voulait savoir si celui-ci avait la vocation, s'il était pieux, s'il
fréquentait les sacrements, s'il priait... Bref, il souhaitait de vrais
futurs prêtres pour Église
Face au laissé aller qu'il y avait déjà à cette époque là dans
certaines paroisses, il décida la tenue d'un Synode diocésain au terme
duquel on y édita certaines prescriptions relatives à l'instruction
religieuse du peuple: - Explication, chaque dimanche, de l'Évangile; -
Mieux préparer les enfants à la première Communion; - Création de
cercles et associations catholiques de jeunes gens, pour les tenir éloignés
des dangers; - Réorganisation des confréries. On peut considérer ce
Synode comme le point de départ de la restauration morale et religieuse
de tout le diocèse de Mantoue.
CARDINAL ET PATRIARCHE
Suite au décès, à, du Cardinal Patriarche
Dominique Agostini, le Pape Léon XIII nommait, le 12 juin 1892, Joseph
Sarto pour lui succéder. Une fois de plus, il demanda à être dispensé
de ces fonctions, mais en vain, et se soumit à la volonté de Dieu.
En octobre de cette année là, il alla revoir sa mère bien-aimée et sa
ville natale et baptisa grand nombre d'enfants. Hélas, ce fut la dernière
fois qu'il embrassa sa chère maman: celle-ci rendit sa belle âme à Dieu
en février de l'année suivante. Pour perpétuer le souvenir de la pieuse
femme, on grava sur sa tombe cette inscription composée par son fils:
MARGUERITE SANSON
FEMME EXEMPLAIRE, ÉPOUSE VERTUEUSE
MÈRE INCOMPARABLE
LE 4 MAI 1852
PERDIT SON MARI BIEN-AIMÉ
JEAN-BAPTISTE SARTO
RÉSIGNÉE ET CALME
DANS LES PEINES COMME DANS LES JOIES
AVEC UN COURAGE VIRIL
ELLE ÉLEVA CHRÉTIENNEMENT SES NEUF ENFANTS
LE 2 FÉVRIER 1894
DANS SA QUATRE-VINGT UNIÈME ANNÉE
ELLE COURONNA
PAR LA MORT DU JUSTE
UNE VIE DE TRAVAIL ET DE SACRIFICE.
__________
POUR LEURS CHERS PARENTS
LE CARDINAL JOSEPH SARTO
SON FRÈRE ET SES SOEURS
DEMANDENT
L'ÉTERNELLE PAIX.
La perte de sa mère lui causa une grande douleur.
Le 25 novembre 1894, il officia pontificalement
pour la première fois dans la Basilique St. Marc, à Venise. Le nouveau
Patriarche recevait chaque jour quiconque avait besoin de lui et
administrait le sacrement de Confirmation. Né pauvre lui-même, il vécut
toujours pauvre d'esprit, plein de pitié pour les souffrances des
malheureux; aussi était-il toujours prêt à secourir ceux d'entre eux
qui s'adressaient à lui. On peut dire que personne ne frappa vainement à
sa porte sans avoir été secouru. Souvent, il visitait les hôpitaux, les
hospices d'aliénés et les prisons. Le zèle et l'activité du Cardinal
Sarto n'avaient pas de bornes quand il s'agissait de soulager les misères
humaines de toutes sortes.
Les
armoiries de Mgr. Sarto furent d'abord: "d'azur à l'ancre tridentée
d'argent au naturel au dessus d'une mer agitée, illuminée d'une étoile
d'or".
Les trois branches de l'ancre symbolisaient la foi, la charité et
l'espérance; "que nous retenons pour notre âme
comme une ancre sûre et ferme" (Hebr. VI-19);
L'étoile rappelait Marie, Étoile de la mer;
Devenu patriarche de Venise, il ajouta à ses armoiries le lion ailé
tenant l'Évangile, qui représente l'évangéliste saint Marc, patron
principal de l'auguste cité, avec ces mots: "Pax tibi Marce
evangelista meus!";
Devenu Pape, Sa Sainteté Pie X a conservé le lion dans ses armes, y
ajoutant seulement les insignes du Souverain Pontificat.
UN PAPE REMARQUABLE
Le 20 juillet 1903, Léon XIII rendit son âme
à Dieu. Quelques jours plus tard, le 26, il quittait Venise pour se
rendre au Conclave.
Après les neuf jours de prières prescrites pour le Pontife défunt, le
soir du 31 juillet, les Cardinaux entrèrent en Conclave; ils étaient au
nombre de 62.
Les premiers scrutins s'étaient orientés vers le cardinal Rampolla,
collaborateur direct de Léon XIII, et fort intelligent; "Rampolla
avait pour lui tous ceux qui voulaient voir se poursuivre la politique libérale
du Pape défunt" (déjà!). Le 1er août, le veto
de l'empereur d'Autriche François-Joseph I et fut apporté par
l'évêque de Cracovie, contre le cardinal Rampolla. Ce veto, qui fut tant
critiqué, sauva Église; car, après sa mort, Mgr. Jouint découvrit des
documents prouvant qu'il était Franc-maçon. Chaque samedi, en effet, le
cardinal Rampolla allait en Suisse y chercher les instructions du pouvoir
occulte qu'il avait mission d'appliquer dans le gouvernement de la Sainte Église
D'après ces documents, il avait reçu l'ordre, pour la France, de faire
rallier les catholiques à la république; et pour l'église, de fonder au
Vatican même une loge dont les membres seraient destinés à occuper les
plus hauts postes dans la hiérarchie ecclésiastique.
Suite à ce veto, le choix du Conclave se porta en faveur du Cardinal
Sarto. A chaque tour de scrutin les voix allaient croissant, et il supplia
très humblement ses collègues de ne plus voter pour lui. Il s'efforçait,
après chaque tour, d'énumérer avec preuves à l'appui, les titres qui
lui manquaient, d'après lui, pour pouvoir être Pape; mais Dieu avait décidé
autrement: Au septième tour le Cardinal Sarto fut élu Successeur de
saint Pierre, le 4 août 1903, par 50 voix en sa faveur. L'humble élu, la
tête basse, les yeux fermés et les lèvres murmurant une prière, écoute
la sentence, et selon la formule habituelle, le Cardinal doyen s'approche
de lui et l'interroge: "Acceptez-vous votre élection, selon les règles
canoniques, au Souverain Pontificat?". L'auguste élu, levant au
ciel des yeux baignés de larmes dit, à l'exemple du Sauveur au Jardin
des Oliviers: "Si ce calice ne peut être éloigné de moi, que la
volonté de Dieu soit faite: J'accepte". Le grand sacrifice est
accompli; Joseph Sarto, l'humble enfant de l'huissier municipal et de la
couturière de campagne, est Pape!
Très émouvante fut la cérémonie du
couronnement, le 9 août 1903, où Pie X y célébra sa toute première
Messe en tant que Souverain Pontife.
Durant les onze années de son pontificat, ce ne sont pas moins de 3.300
documents officiels qu'il rédigera pour restaurer tout dans le Christ: "Nous
déclarons que notre but unique, dans l'exercice du suprême Pontificat,
est de tout restaurer dans le Christ afin que le Christ soit tout et en
tout", écrivait-il dans sa première Encyclique "E
Supremi Apostolatus" du 4 octobre 1903.
LE DÉFENSEUR DE JÉSUS-CHRIST ET DE
SON ÉGLISE
Quel est le rôle d'un Pape?, demandais-je un
jour au curé qui se chargeait de faire le catéchisme. Le Pape, me
dit-il, en sa qualité de Vicaire de Jésus-Christ sur la terre et défenseur
de Église, a pour rôle de maintenir intacte la foi et la doctrine
catholique. Voilà une définition dont on devrait s'en inspirer
aujourd'hui encore!... A peine monté sur le trône pontifical, Pie X se
mit courageusement à l'oeuvre et commença par revendiquer la pleine
liberté du Sacré-collège dans l'élection du Souverain Pontife.
Un peu plus d'un an après son élection, Pie X dut faire face à
l'injuste loi française de séparation de Église et de l'état, votée
par le parlement, le 9 décembre 1905. Les effets de cette loi se firent
sentir aussitôt:
- Spoliation des biens du clergé
- Persécution contre les institutions de bienfaisance;
- Dissolution des congrégations religieuses;
- Attaque sans merci contre les soeurs des hôpitaux, des écoles; des
orphelinats et des asiles d'aliénés.
Pourtant, combien de services n'avaient-elles pas rendus à la France, ces
soeurs qui, pour s'occuper des handicapés, des orphelins, des enfants ou
des malades, avaient quitté parents, amis, richesses, honneurs et tout ce
que leur offrait le monde!
C'est dans ce contexte que Pie X protesta énergiquement: par l'Encyclique
Vehementer du 11 février 1906; le Pape condamna solennellement la
loi de séparation; puis, près d'un an plus tard, il condamna dans son
Encyclique "Une fois encore" la persécution contre Église,
en France.
Église du Portugal fut elle aussi persécutée, d'une manière plus
violente et plus barbare que l'avait été celle de France. Là encore,
Pie X se conduisit comme il s'était conduit pour la France: L'Encyclique Jamdudum
in Lusitania du 24 mai 1911 condamna les lois de persécutions et
renouvela l'appel à l'union et à la persévérance dans la foi
catholique. Ainsi, une seconde fois, le Pape Pie X, avec une charité évangélique,
vint au secours des victimes de la persécution, accueillant par la même
occasion, au Vatican, les prêtres et évêques portugais.
Le 24 mai 1910, il publia l'Encyclique Editae
saepe dans laquelle il mettait en relief sa force d'âme dans la lutte
contre les erreurs du temps. Il indiquait les caractères qui distinguent
la vraie réforme de la fausse, en démasquant les prétendus réformateurs
dont le but inavoué était de détruire la foi. C'est pourquoi, Pie X
exhortait tous les fidèles à vivre en bons chrétiens, à fréquenter
les sacrements et à se dépenser pour le salut des âmes.
Il eut également à protester contre les
vexations des indiens du Pérou et des autres pays voisins. Il le fit par
la lettre Lamentabili, du 7 juin 1912, aux évêques de l'Amérique
Latine.
Les incroyants eux-mêmes ne purent s'empêcher
d'admirer l'œuvre de Pie X: c'est ainsi que, le 24 juin 1914, la Serbie
conclut un Concordat aux termes duquel les catholiques de ce pays
jouiraient désormais d'une pleine liberté dans l'exercice du culte, et
un Séminaire ouvrit à Belgrade.
LE VENGEUR DE LA FOI
Déjà à l'époque, des théories nouvelles
menaçaient Église Certains éprouvaient la démangeaison de réformer
les doctrines catholiques en les remplaçant par d'autres mieux adaptées
aux conditions des temps modernes; comme si les dogmes catholiques
devaient changer avec les idées des hommes et comme si c'était à la
religion à s'adapter aux hommes, et non le contraire. Dieu devrait-il être
au service de l'homme? Penser cela serait faire de l'homme un dieu dont
Dieu serait son esclave! Hérésie aujourd'hui largement répandue par la
doctrine progressiste...
Les modernistes, donc, commençaient à s'infiltrer un peu de partout. Pie
X s'en inquiéta pour le salut des âmes et pour la doctrine même de Église
Le 8 septembre 1907, il publia son admirable Encyclique Pascendi
dominici gregis contre le modernisme, qui faisait suite au décret
Lamentabili sane exitu paru un trimestre plus tôt, le 3 juillet 1907.
C'est sensiblement à cette époque qu'il intervient dans la question du
Sillon.
LE RÉFORMATEUR
Le Pape Pie X réglementa aussi la prédication
et l'enseignement du catéchisme. Rappelant aux curés leur devoir
d'instruire le peuple des vérités de la religion, il voulut que, chaque
dimanche et à chaque fête de l'année, ils expliquent le texte du catéchisme
du Concile de Trente.
Le 20 décembre 1905, il publia le décret Sacra
TRIDENT INA Synodus où il exhortait à la Communion fréquente et
quotidienne, tous les fidèles ayant atteint l'âge de raison.
Cette sollicitude du Saint-Père à rappeler tous les fidèles à la
Communion fréquente et quotidienne produisit partout une bonne
impression: les prêtres rivalisèrent de zèle pour répandre cette
sainte pratique, et les fidèles répondirent avec empressement à l'appel
du Souverain Pontife. Ce fut un véritable réveil universel de la dévotion
à l'Eucharistie.
Constatant qu'un peu partout on retardait d'une façon abusive l'acte
solennel de la première Communion, il décida que celle-ci se ferait désormais
à l'âge de sept ans.
LE LITURGISTE
Le seul chant liturgique adopté par Église fut
celui auquel St. Grégoire le Grand a donné son nom. A côté du chant grégorien
Église admit aussi la musique polyphonique, que le génie classique de
Palestrina et de quelques autres compositeurs porta à son apogée au XVIème
siècle.
Toutefois, ça et là, les compositions profanes et théâtrales prenaient
le pas sur le chant grégorien qui, par ailleurs commençait à être dénaturé
par les liturgistes.
Dans son Encyclique Motu proprio du 22 novembre 1903, le Pape Pie X
s'élevait avec force contre cette profanation. Il créa une commission spécialement
chargée de rétablir dans sa beauté primitive le chant liturgique, et
fonda l'école supérieure de musique sacrée.
A ses réformes nécessaires, il se devait d'y
ajouter celle du Bréviaire et du Missel: par la Bulle Divino afflatu
du 1er novembre 1911, il traça les grandes lignes de cette
importante réforme, à l'issu de quoi le nouveau Bréviaire et le nouveau
Missel furent publiés.
Comme chacun le sait, les Saints et les
Bienheureux sont nos intercesseurs auprès de Dieu. Nous recourons à eux
pour obtenir les grâces dont nous avons besoin. Pie X canonisa donc
quatre Saints et béatifia soixante-treize Bienheureux:
Canonisations :
11 décembre 1904 : |
saint Alexandre
sauli, barnabite, Supérieur de sa congrégation,
puis évêque du diocèse d'Aléria.
saint Gérard Majella, Frère
laïque chez les rédemptoristes. Nombreux miracles. |
20 mai 1909 : |
saint Joseph
Oriol, Chanoine de Sainte-Marie du Pin,
près de Barcelone.
saint Clément-Marie Hofbauer, Rédemptoriste.
Fonda à Varsovie une congrégation de son Ordre. |
Béatifications :
18 décembre 1904 : |
Bx. Gaspar del
Buffalo, fondateur de la congrégation
des Missionnaires du Précieux-sang |
27 décembre 1904 : |
Bx. Etienne
Bellesini, Ermite de l'Ordre de St.
Augustin, puis curé de Notre-Dame de Gennazano |
1er janvier 1905 : |
Bx. Agathange de
Vendôme, Capucin à Vendôme, fut envoyé
en Égypte. Martyr en Abyssinie.
Bx. Cassien de Nantes, Capucin.
Martyrisé en Abyssinie. |
8 janvier 1905 : |
Bx. Jean-Marie
Vianney, curé d'Ars, en France |
15 janvier 1905 : |
Bx. Marc Crison,
Chanoine, brutalement tué par des soldats clavistes
à Körösi, en Hongrie.
Bx. Etienne Pongracz, Jésuite,
brutalement tué par des soldats clavistes à Körösi, en
Hongrie.
Bx. Melchior Grodecz, Jésuite,
brutalement tué par des soldats clavistes à Körösi, en
Hongrie. |
13 mai 1906 : |
Bse. Julie
Billiart, Fondatrice de l'institut de N. D.
pour l'éducation chrétienne des filles, à Amiens (France). |
20 mai 1906 : |
Les huit Martyrs
dominicains du Tonkin, Missionnaires
envoyés au Viêt-nam, Martyrisés à Tonkin, en 1745 |
27 mai 1906 : |
Les seize Carmélites
de Compiègne, Religieuses Martyrs sous
la Révolution française, exécutées en 1794. |
10 juin 1906 : |
Bx. Bonaventure
Gran, Frère mineur, fonda plusieurs
maisons de retraite de son Ordre, en Italie. |
17 mai 1908 : |
Bse.
Marie-Madeleine Postel, Fondatrice des Sœurs
des écoles chrétiennes. |
24 mai 1908 : |
Bse.
Madeleine-Sophie Barat, Fondatrice de la
congrégation du Sacré-Cœur de Jésus. |
31 mai 1908 : |
Gabriel
dell'Addolorata, Passioniste. |
18 avril 1909 : |
Bse. Jeanne d'Arc,
Fille de paysans, elle délivra la France des
anglais. |
25 avril 1909 : |
Bx. Jean Eudes,
fonda la congrégation N. D. de la Charité du
refuge, et la Société de Jésus et de Marie. |
2 mai 1909 : |
Trente-quatre
missionnaires Martyrs d'Extrême-Orient, Missionnaires
envoyés en Chine, martyrs |
Le cinquantième anniversaire de la proclamation
du Dogme de l'Immaculée Conception fut pour Pie X un motif de plus de
faire aimer la Vierge Marie. L'Encyclique Ad diem illum, du 2 février
1904 exhorte tous les fidèles à honorer cette bonne Mère du Ciel et à
implorer souvent sa protection. Quatre ans plus tard, on y célébra le
cinquantenaire de l'Apparition de la Sainte Vierge à Lourdes.
LE LÉGISLATEUR
Le 19 mars 1904, Pie X décida qu'il fallait
codifier le Droit canonique. Dans ce but, il établit une commission de
Cardinaux chargée d'établir des projets de lois. Le nouveau code fut
publié sous Benoît XV, son successeur, mais cela n'enlève rien à la
gloire de Pie X, qui vraiment mit toute son âme au service de son élaboration.
En France, la famille commençait à être attaquée par les idées
franc-maçonnes. Aussi, pour protéger l'intégrité de la famille, Pie X
modifia, par décret Ne temere, du 2 août 1907, les règles
relatives aux fiançailles et à la célébration du mariage.
LA MORT DU SAINT PAPE
1914: la première guerre mondiale éclate!. On ne saurait dire la
souffrance de Pie X à la pensée de l'affreuse tuerie sur les champs de
bataille. L'ardente prière pour la paix qu'il envoya à tous les
catholiques du monde, le 2 août 1914, fut l'expression la plus émouvante
de sa douleur.
Une bronchite avait affaibli sa robuste
constitution, mais surtout la vision de cette horrible guerre, de jour en
jour plus sanglante, l'avait abattu. L'auguste malade passait ses journées
et ses nuits à prier, pour le retour de la paix. Cependant, son état de
santé empirait de jour en jour.
Le 19 août 1914, le Prélat Sacriste lui
administra les derniers sacrements, qu'il reçut avec beaucoup de piété.
Il avait perdu déjà l'usage de la parole, mais il gardait sa lucidité
et comprenait tout. A une heure et quart du matin (donc la nuit du 19 au
20), le saint Pape rendait son âme à Dieu.
LE TESTAMENT DE PIE X
Pie X débute son testament par une invocation
à la Très Sainte Trinité, suivie d'un acte de confiance en la divine
miséricorde, puis il ajoute:
"Je suis né pauvre, j'ai vécu pauvre et je veux mourir pauvre. Je
prie le Saint-Siège d'accorder à mes sœurs Anne et Marie une pension
qui ne dépasse pas 300 francs par mois, et à mon valet de chambre une
pension de 60 francs".
(Ici, les sommes sont exprimées en anciens francs, valeur 1914. Bien
entendu, sur le testament elles apparaissent en lires).
De plus, il lègue 10.000 francs à ses neveux, mais en soumettant ce don
à l'approbation de son Successeur, qu'il prie également de considérer
s'il est possible de délivrer à sa famille les 100.000 francs qu'un généreux
donateur lui remit à cette intention. Il demande que ses funérailles
soient aussi simple que les règles liturgiques le permettent. Il défend
d'embaumer son corps, et veut qu'on l'ensevelisse dans les souterrains de
la Basilique Vaticane.
Ce que Pie X lègue à ses soeurs suffit à
peine à leur assurer le vivre et le couvert. Aussi, les parents du
Serviteur de Dieu restèrent-ils, après sa mort, dans l'humble condition
où ils se trouvaient lors de son élévation au Saint-Siège.
La dépouille mortelle de Pie X, revêtue des
ornements pontificaux, fut exposée dans la Salle du Trône, puis on le
transporta à la Basilique saint Pierre et exposée dans la chapelle du Très
Saint Sacrement. La cérémonie religieuse eut lieu le 23 août 1914.
Le premier procès en vue de sa canonisation eut
lieu le 14 février 1923 et dura jusqu'en 1931. Douze années plus tard,
le Pape Pie XII ouvrit le second procès et, le 3 juin 1951 au matin, après
le chant des Litanies des Saints, Pie X fut solennellement proclamé
Bienheureux dans la Basilique Saint Pierre de Rome, puis enfin canonisé
en 1954.
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