Jeune pianiste prodige, il est l'élève du grand virtuose
Ricardo Vinès, ami d'Albeniz, de Debussy et de Ravel, qui
l'introduit dans les milieux musicaux parisiens, où il
rencontre notamment Satie et Auric. A dix-huit-ans déjà, après
quelques leçons de composition auprès de Charles Koechlin, il
fait entendre une Rapsodie nègre prometteuse, où l'on
trouve déjà les qualités de la musique de Poulenc, originalité
mélodique, sens des timbres et des rythmes.
Mobilisé en 1914, il compose alors assez peu, excepté Le
Bestiaire sur des poèmes d'Apollinaire (1918-1919), son
premier cycle de mélodies, un genre dans lequel il excellera
par la suite. L'influence de Satie, et son goût de l'indépendance
l'amènent tout naturellement à faire partie du Groupe des Six
(avec Honegger, Milhaud, Auric, Germaine Tailleferre et Louis
Durey), ensemble de musiciens réunis non par un programme, mais
par l'amitié et des goûts communs - pour le cirque, le
music-hall, le jazz, la mélodie populaire et l'humour : c'est
cet esprit qui anime le ballet Les Biches, créé en 1924
par les Ballets Russes. Ce divertissement sera pourtant
très vite suivi par des oeuvres autrement plus ambitieuses,
comme le Concert champêtre (1928), pour clavecin et
orchestre, écrit pour la grande claveciniste Wanda Landowska,
et L'Aubade, pour piano et dix-huit instruments à vents,
où, derrière les clins d'oeil et le style galant, perce un
certain sens du tragique.
Le tournant décisif de son oeuvre sera pourtant pris un peu
plus tard, lors d'un pèlerinage à Rocamadour, au retour
duquel, profondément touché par la foi chrétienne, il écrit
sa première oeuvre religieuse, les Litanies à la Vierge
noire (1936). Il professera alors désormais une sorte de «
foi du charbonnier », qu'il oppose volontiers à son côté «
mauvais garçon » libertin - « moine ou voyou », dira le
critique Claude Rostand. Dès lors, toute sa carrière va se
tourner essentiellement vers la musique vocale et dramatique,
dans un processus qui aboutira à la fusion de l'inspiration
religieuse et profane avec le Dialogue des carmélites (1957).
Entre-temps il écrit, notamment, la cantate Figure humaine
(1943), sur un texte d'Eluard, un de ses poètes favoris, qu'il
mettra plusieurs fois en musique ; sa foi catholique lui inspire
l'admirable Stabat Mater (1950) ; de retour d'une tournée
aux Etats-Unis couronnée de succès, il donne enfin La Voix
humaine (1959), d'après Cocteau, écrite pour la soprano
Denise Duval, à laquelle il dédiera plusieurs de ses oeuvres,
comme il le fera aussi avec ses amis, le pianiste Jacques Février,
(avec lequel il joue en duo), ou le baryton Pierre Bernac, qu'il
accompagne au piano lors de la création de ses cycles de mélodies
: très discret dans sa vie privée, il gardera toute sa vie de
profonds liens d'amitié.
C'est peu après l'achèvement de ses Répons pour les
temps de ténèbres (1963), qu'il meurt d'une crise
cardiaque à son domicile parisien.
Parmi les musiciens de sa génération, Poulenc est le seul
à n'avoir pas connu de « purgatoire », et à avoir toujours
été très régulièrement joué. Il est vrai que sa musique,
qui personnifie si bien l'esprit français - clarté, sens de la
mesure, humour, sensualité - a beaucoup moins vieilli que
d'autres. Sans doute Poulenc a-t-il su échapper à cette trop
grande facilité qui était la sienne, et qui se ressent dans
certaines oeuvres, pour devenir ce grand musicien dont le génie
s'est épanoui dans le domaine religieux ou dramatique.
Gracieuseté de : http://diplomatie.gouv.fr
|