La bande à Bonnot

Le 21 décembre 1911 commence l'épopée de la bande à Bonnot. Ce jour-là quelques illégalistes deviennent les "bandits tragiques". Dans une époque de misère, d'injustice, de luttes sociales sans merci, les premiers criminels en auto vont inscrire en lettres de sang une histoire qui tiendra en haleine une France apeurée devant tant d'audace et désespérée par l'échec de la police.

Ce 21 décembre 1911 vers 9h du matin, Bonnot, Garnier, Callemin et un quatrième homme décide de s'attaquer au garçon de recette de la Société Générale rue Ordener à Paris. Le butin est plutôt maigre des titres et seulement 5000 francs en espèce. Le garçon de recette est gravement blessé. Le lendemain les journaux se déchaînent sur la bande. Après avoir abandonné leur automobile à Dieppe, ils reviennent à Paris, traqués par la police. Ils ne savent que faire, ils errent, traqués, dans la ville, sans évasion possible, prêts à se faire tuer n'importe où. Par solidarité, pour partager cette amère joie du risque mortel, d'autres se joignent à eux: René Valet et Soudy. À la veille de Noël, Garnier et Callemin trouve refuge chez Kibaltchiche (Victor Serge) et Rirette Maitrejean deux anarchistes. Quelques jours après leur départ Kibaltchiche et Rirette sont arrêtés. Tous deux refusent de livrer Garnier et Callemin. La bande ne reste pas inactif. En France et en Belgique, ils tentent avec plus ou moins de succès un certain nombre de "reprises".

Deux armureries sont pillées à Paris.

À Gand, ils volent la voiture d'un médecin.

Dans la même ville, le 25 janvier, le vol d'une seconde voiture tourne moins bien. Ils sont surpris par un chauffeur qui est assommé à coups de clé anglaise. Un agent de police les interpelle. Callemin l'abat.  C'est autour d'un certain Eugène Dieudonné de ce faire arrêté. C'est un anarchiste et Caby le garçon de recette de la Société Générale le reconnaît comme son agresseur. Dieudonné nie sa participation au hold-up de la rue Ordener.

Dans la nuit du 2 au 3 janvier 1912 à Thiais, deux vieillards sont assassinés, puis le 27 février à Paris à la suite d'une banale altercation un policier est abattu.

Le 29 février, le trio tragique descend un boulanger alors qu'ils tentaient de cambrioler un pavillon.

Pour les illégalistes, traqués, affamés, sans secours, devant qui toutes les portes se ferment, la lutte terrible engagée contre la société ne peut que continuer jusqu'à l'issue fatale. Ils le savent : tous y resteront. Les illégalistes sont des bêtes fauves poursuivies par des chasseurs de plus en plus déterminés que la peur rend courageux. Leurs photos s'étalent dans les journaux. Les têtes sont mises à prix.

Bonnot se devait d'organiser un coup de force inouï. Après avoir volé une voiture sur la route de Melun et avoir blessé gravement ses passagers, ils se dirigent vers Chantilly et notamment la banque de la Société Générale. Garnier, Valet Callemin entre dans la banque revolver au point. Soudy fait le guet à l'entrée. Le bilan est de deux morts et 50000 frs. Deux cents inspecteurs de police se mettent en campagne. La banque offre une prime de cent mille francs à qui permettra la capture des bandits. Pendant toute une semaine, les quotidiens donnent la priorité à ce fait divers, avec des pages entières de photos où se retrouvent pêle-mêle les morts, les blessés et les témoins.

Soudy se fait arrêté à Berck-sur-mer le 30 mars. Le 7 avril, Raymond Callemin se fait arrêté à son tour. Le 24 avril un dénommé Monier est arrêté, il a participé aux affaires de Montgeron et de Chantilly. Lors de son arrestation il avait deux brownings chargés. Pendant ce temps Bonnot loge dans un appartement à l'insu de son propriétaire.

Fin avril, Jouin le sous-chef de la sécurité repère Bonnot et tente de l'arrêté. Bonnot descend le sous-chef de la sécurité et réussi à s'enfuir. Il est blessé au bras. Après l'assassinat de Jouin, Bonnot conçoit sa fuite intelligemment. Il garde une allure raisonnable. Ne hâte pas le pas. Il arrive ainsi à Paris sans histoire. Chaque soir, il se met en quête d'un nouvel abri. Nul ne doute de sa capture à plus ou moins longue échéance. La décision de le tuer rallie tous les suffrages.

Jamais la police, encouragée par le gouvernement, ne pense un seul instant prendre vivant son gibier. Bonnot court toujours. Sa piste semble perdue lorsqu'un pharmacien de Choisy-le-roi déclare qu'il a donné des soins à un homme blessé à la main et dont le signalement correspond à celui du fuyard. Effectivement Bonnot trouve refuge chez un anarchiste : Dubois. Le dimanche 28 avril une quinzaine d'inspecteurs cernent le pavillon de Dubois. Dubois qui était dans le garage leur tire dessus avant de se faire abattre.  Bonnot se barricade et blesse un inspecteur. Sans être nourri, le tir l'est tout de même suffisamment pour tenir les policiers en respect et les obliger à se mettre à l'abri. Ceux-ci pensent que Bonnot n'est pas seul. 

Le siège commence. La fusillade a réveillé toute la localité. De Choisy, d'Alfortville, de Thiais et même de plus loin, rappliquent des hommes armés de carabines, de fusils de chasse. Cinq cents hommes armés sont là disséminés dans les haies. Le maire de Choisy et le préfet Lépine arrivent. A neuf heures, arrivent successivement deux compagnies de la Garde républicaine. De toute la banlieue, de Paris on continue à affluer vers Choisy. C'est un spectacle à ne pas manquer. Vingt mille spectateurs accourus en train, en fiacre en auto ou à pieds. Ordre est donné d'acheminer l'entier régiment d'artillerie stationné à Vincennes. On demande également une mitrailleuse lourde. Un cordon de tirailleurs cerne maintenant la maison.  

Midi. Il y a maintenant près de trente mille personnes autour du pavillon. Trente mille personnes venus assister à l'agonie d'un illégaliste. L'agonie de la bête va durer des heures. La fusillade ne connaît aucun répit. Tous les assiégeants pensent jouer un rôle historique. Ils sont persuadés qu'ils ont à venger les crimes de Bonnot. On boit, on parle, on s'interpelle, on rit. On le peut car de son repaire Bonnot n'est pas en mesure d'atteindre tous ces bravaches et redresseurs de torts de pacotille. Tous ces gens qui hurlent à la mort, pris individuellement, sont des pleutres et des lâches pour la plupart. Leur nombre leur donne un sentiment de puissance invincible. Cette foule est bourreau. Elle a accepté les yeux fermés les récits fantaisistes de la presse sur Bonnot. On décide de dynamiter le repaire. Bonnot se sait perdu. Il rampe jusqu'à la table, prend plusieurs feuilles et rédige une sorte de testament. Le siège se fait plus pressant. Le pavillon est dynamité.. Des débris de pierres et de terre frappent Bonnot. Il se réfugie entre deux matelas. Il saigne abondamment.  Une nouvelle fois le pavillon est dynamité. Les policiers décident d'entrer dans le pavillon. Après avoir traversé la première pièce, ils débouchent dans la chambre.

Bonnot est là. Luttant contre le dégoût, le chagrin et la fatigue, il s'écrie:"salauds". Il a encore la force de tirer trois coups. Les autres ripostent. Peu à peu les taches de sang sur le sol s'élargissent. C'en est fini de l'homme symbole de l'illégalisme. Bonnot a été atteint de six balles. Il arrive à l'Hôtel-Dieu où il rejoint à la morgue Dubois. Ce Dubois qui n'était ni un voleur, ni un assassin. tout simplement, un homme fidèle à son idéal anarchiste, fidèle à ses amitiés, et qui a poussé le sacrifice jusqu'à avertit Bonnot par ses cris et à se faire tuer pour son ami.

En attendant la police parade et une vente aux enchères se tient sur l'emplacement du pavillon. Il reste deux membres de la bande à Bonnot en liberté. Garnier et Valet sont toujours en cavale. Ils logent dans un pavillon de banlieue à Nogent-sur-Marne. Le 14 mai la sûreté les à repéré. Pour éviter la mascarade de Choisy tout a été fixé et préparé dans le plus grand secret. Ce sera pire. Le pavillon est cerné et les inspecteurs de la sûreté entre dans le jardin ou ils sont accueillis a coups de pistolets. Le siège le plus fou de toutes les annales de la criminalité va commencer. Pour tuer Garnier et Valet, il faudra neuf heures de fusillades nourries, des centaines de policiers, un bataillon de zouaves sur le pied de guerre. Sans parler de plusieurs mitrailleuses lourdes mises en batteries. Durant la fusillade plusieurs inspecteurs de police sont touchés. 

Un nouveau bataillon de zouaves, soit trois cents hommes, arrive au pas de gymnastique. Ils sont salués par les ovations de la foule de plus en plus dense. Deux cents gendarmes, munis de leur carabine, se placent en embuscade. Le pavillon est dynamité, la toiture s'est envolé mais les deux hommes sont toujours là. La nuit est tombé maintenant.

À minuit, quarante mille personnes au moins se massent aux abords du pavillon.  Deux compagnies de zouaves supplémentaires sont dépêchées.  On tente de dynamité le pavillon une nouvelle fois sans succès. Valet et Garnier se déchaîne et un inspecteur est de nouveau tué. À minuit, la troupe arrête le feu faute de munitions. Le ministre de l'intérieur arrive sur les lieux. Après avoir éventré le pavillon à la dynamite, les policiers tentent une approche. Tout à coup, c'est la débandade. Garnier et Valet les mitraillent à bout portant. La fusillade a fait deux blessés. Enfin, sonne le "cessez-le-feu". Ce sera le dernier.

Soldats, policiers, pêle-mêle, se lancent à l'assaut. La bousculade est générale. Ils arrivent enfin dans la pièce ou sont retranchés les deux hors-la-loi. Le spectacle est hideux. Du sang, partout. Sur le plancher, sur les murs. Des douilles de balles par centaines. Il est deux heures du matin. Garnier et Valet tentent une dernière fois de tirer puis sont abattus.

Trois heures, tout est accompli. Le siège a duré plus de neuf heures. Cent mille personnes se précipiteront sur les lieux du drames. Le lendemain, les corps sont jetés dans la fosse commune du cimetière de Bagneux. Bonnot et ses lieutenants tués ou assassinés par la police restaient leurs complices toujours incarcérés. Pour Callemin, Soudy et Monier (il avait hébergé Bonnot), c'est la peine de mort. C'est également la peine de mort pour Dieudonné. Deux autres sont condamnés aux travaux forcés à vie. Un autre dix ans puis encore six ans. Pour Kibaltchiche c'est 5 ans de réclusion. Les condamnés à mort sont exécutés le 21 avril. Dieudonné est gracié inextrémis et sa peine commué en travaux forcé à perpétuité.

 

Joe DassinAbazada
La bande à Bonnot
Paroles


La bande à Bonnot 


Am                F7
A la Société Générale
F7         Am       F7         E7
Une auto démarra et dans la terreur
E7 Am                     F7
La bande à Bonnot mit les voiles
F7        Am            F7        E7
Emportant la sacoche du garçon payeur
E7      A7
Dans la De-Dion-Bouton qui cachait les voleurs
A7          Dm
Octave comptait les gros billets et les valeurs
        H7
Avec Raymond-la-Science les bandits en auto
    E7      F7        E7
C'était la bande à Bonnot

    Am                    F7
Les banques criaient "Misérables!"
F7           Am                F7        E7
Quand s'éloignait le bruit du puissant moteur
E7  Am                    F7
Comment rattraper les coupables
F7           Am                F7              E7
Qui fuyaient à toute allure à trente-cinq à l'heure

E7        A7
Sur les routes de France, hirondelles et gendarmes
A7                Dm
Étaient à leurs trousses, étaient nuit et jour en alarme
Dm     H7
En casquette à visière, les bandits en auto
     E7     F7        E7
C'était la bande à Bonnot
 
A
Mais Bonnot rêvait des palaces
               D
Et du ciel d'azur de Monte-Carlo
               H                         E7
En fait il voulait vite se ranger des voitures

E    Am                  F7
Mais un beau matin la police
F7       Am           F7        E7
Encercla la maison de Jules Bonnot
E7  Am                 F7
A Choisy, avec ses complices
F7            Am                  F7       E7
Qui prenaient dans sa chambre un peu de repos
        A7
Tout Paris arriva à pied, en tramway et en train
A7          Dm
Avec des fusils, des pistolets et des gourdins
     H7
Hurlant des balcons, les bandits en auto
     E7     F7         E7
C'était la bande à Bonnot

    Am               Dm  Am
Et menottes aux mains
    Am              Dm   Am
Tragique destin
 Am                     F7
Alors pour la dernière course
            Am            F7    E7    Am
On mit dans le fourgon la bande à Bonnot
 


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